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Pierre Perret est un auteur-compositeur-interprète français. Cet artiste dans un style apparemment naïf, voire enfantin, avec candeur et humanisme pose nombre de questions pertinentes qu'il déclame avec un sourire malicieux. Chanteur populaire et auteur reconnu, Pierre Perret s'illustre par un répertoire hétéroclite composé tour à tour de chansons enfantines, comiques, grivoises, légères ou engagées, qui naviguent entre humour et tendresse. En marge de la chanson, il a publié de nombreux ouvrages sur la langue française et plusieurs sur la gastronomie, son autre grande passion. Il était présent à la seconde édition de l'événement palois "Les Idées Mènent le Monde" sur le thème de l'Enfance. Dans cet entrevue, il aborde son enfance pendant la Seconde Guerre Mondiale, ses chansons engagées et raconte la genèse de la chanson LILY.
Bonjour Pierre Perret
Salut la foule en délire !
Aujourd’hui, nous nous retrouvons durant « Les Idées mènent le monde » sur le théme de l’Enfance. Malgré les attentats du vendredi 13 novembre, vous êtes venu à Pau. Dans quel état d’esprit êtes-vous Pierre ?
D’abord, évoquer l’enfance n’est pas un pensum pour moi car dans toutes mes chansons on retrouve une partie d’enfance. Puis depuis tout petit, je suis observateur et attentif des choses qui m’entourent et c’est avec la même appétence qu’aujourd’hui je regarde tout ce qui se passe autour de moi comme quand j’avais 8 ans. Et à l’époque j’avais déjà les yeux très ouvert puisque mon enfance c’était l’Occupation, les Allemande plein le café de mes parents. Cela vous fait mûrir d’un coup. Dix fois plus vite que les enfants coucounés de maintenant qui tapotent sur leur IPhone sans se soucier de savoir s’ils vont pouvoir retrouver leurs copains après… Ce type d’enfance que j’ai connu avec une certaine restriction d’un certain bonheur qu’on a vécu. I y a des enfances que ‘on ne peut pas oublier et le rôle de la famille est très important ! J’ai été très entouré par mes parents. Je suivais aveuglément tout ce qu’ils m’ont dit. J’aurai pu traverser l’Atlantique s’ils me l’avaient demandé. Même quand Papa allait amener des déserteurs de l’armée allemande au maquis. Quand on a ouvert ses yeux d’enfants sur ce genre de situation, même des situations comme d’aujourd’hui, je ne peux pas vous dire que cela vous laisse un peu à vide parce que la bêtise et la barbarie, crasse à ce point-là, ne peuvent laisser personne indiffèrent. Donc on fait face, et surtout il faut faire savoir aux autres qu’il faut faire face. Qu’il ne faut pas baisser les bras. Et que la France n’est pas un pays d’esclaves. C’est le pays de Voltaire et de Gavroche.
Vos textes engagés ont touché des milliers de personnes. Certaines phrases raisonnent toujours dans nos mémoires. Avec ces événements tragiques, ne pensez-vous pas que cela donne à vos mots une dimension plus forte encore et que c’est un devoir à l’auteur de crier très fort ses opinions ?
Mais si ! Plus que jamais ! Voilà pourquoi en quoi la Culture est importante car le poids des mots est infini dans ces moments-là. Les personnes qui ont changé le monde sont celles dont la parole a été écoutée. Je peux parler de Voltaire, de Victor Hugo ou de Jean Jaurès. Ces personnes qui a un certain moment ont fait changer l’Histoire par un discours qui a transcendé ceux qui les écoutaient. C’est ça qui change le Monde. Ce n’est pas de se baisser, de se coucher, d’être lâche ! Par exemple une des seules chansons de Georges Brassens avec laquelle je n’ai jamais été d’accord c’est les deux oncles. Je ne peux pas accepter ça ! C’est pourtant un auteur que j’aime et c’était même un ami.
On vous connait avec des chansons humoristique mais il y a des chansons dans votre répertoire qui sont clairement engagées (La femme grillagée, La bête est revenue, Femmes battues…) . Est-ce que le fait de taper du poing sur la table à un moment donné en disant que vous pouvez chanter cela aussi ne vous a pas mis en difficulté ou que des gens se sont éloignés de vous ?
Sans doute mais je pense que celles qui se sont éloignées auraient dû s’éloigner plus tôt et je les en remercie ! Je n’ai pas à m’encombrer de ses gens-là. J’en ai trop de curieux, d’intéressants qui viennent et qui savent qui est Rousseau ou Lorca. C’est gens là m’intéressent mieux que les autres parce que tous les gouts sont dans la nature mais il en est qui ne sont pas les miens et qu’il y a des gens que je ne fréquenterai jamais. Voilà…
Avec l'actualité, votre chanson LILY est sur toutes les lèvres. Cette chanson contre le racisme a presque 40 ans. Elle est utilisée dans les manuels scolaires, dans les manifestations contre le racisme et elle a même été un sujet de baccalauréat il y a 2 ans. J'imagine que l'on vous a posé cette question plusieurs fois mais comment avez-vous écrit cette chanson et imagineriez-vous cet impact sur les gens ?
Je vais essayer de vous la faire courte en vous racontant quelque chose que j'ai rarement dit. Dans les années 70, je suis allé en Amérique avec mon épouse et une copine qui adore New York. En arrivant à New York, nous avons appris qu'Angela Davis sortait de prison et qu'elle allait faire un meeting au Madison Square Garden le lendemain de notre arrivée. On a pris des places tout de suite. Le lendemain, nous nous sommes retrouvés dans une salle de 50000 personnes et il y avait 49997 noirs et nous étions les seuls blancs. C'était un spectacle hallucinant de voir Angela Davies au Madison Square Garden devant 50000 personnes avec le poing levé. La période était terrible à cause du racisme et elle était devenue un personnage symbolique très fort car elle était allé si loin qu'évidemment les autorités l'avaient mise en prison. Donc ce jour-là, elle a été posé sur la scène dans une cage en verre anti-balle. Et cette femme toute seule dans une cage en verre avec son micro au milieu de cette foule le poing levé m'a marqué profondément . Je suis sorti de là bouleversé et en plus je comprenais très mal l'anglais à cette époque. Mais il y avait une telle force dans son cheminement corporel avec les réactions de la salle, tout était terrible. Quelques jours après je suis rentré en France. J'ai pris mon cahier d'écolier et je me suis mis à écrire... et cette chanson a été terminé 4 ans après. J'ai mis 3 ans et demi à ne pas réfuter le mot qui était de trop ou à regrette celui qui aurait manqué. Je ne voulais pas que cela soit une mise au pilori. Pas d'accusation ni donner une leçon. Je voulais que cela soit un constat et de montrer ce dont on est capable de faire. C'est tout.
Est-ce que vous sentiez que c'était une chanson qui pouvait changer quelque chose ?
J'ai toujours espéré que cela apporte une demi goutte d'eau à l'édifice mais c'est tellement important. Regardez aujourd'hui c'est multiplié par dix. On est capable de laisser mourir des milliers de personnes dans des bateaux affrétés par des voyous qui prennent l'argent de ces pauvres gens qui ont économisé depuis des années . C'est misérable. J'estime que cette chanson est nécessaire de plus en plus...
Aujourd'hui Pierre Perret, pour conclure notre entrevue, quel message avez vous envie de faire passer à ces diverses générations de toutes les couleurs ?
N’arrêtez jamais d'écouter LILY ! N’arrêtez jamais d'écouter La bête est revenue ! Ne croyez pas toujours ce que l'on vous dit tous les jours ! Faites travailler vos méninges ! Lisez des auteurs qui vous enrichiront et croyez moi, il y en a plein !
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Qui est Angela Davies ?
Angela Yvonne Davis, née le 26 janvier 1944 à Birmingham en Alabama, est une militante des droits de l'homme,professeur de philosophie et militante communiste de nationalité américaine.
Militante du mouvement des droits civiques aux États-Unis, membre des Black Panthers, elle fut poursuivie par la justice à la suite de la tentative d’évasion de trois prisonniers, qui se solda par la mort d’un juge californien en août 1970. Emprisonnée vingt-deux mois à New York puis en Californie, elle fut finalement acquittée et poursuivit une carrière universitaire qui la mena au poste de directrice du département d’études féministes de l’université de Californie. Ses centres d’intérêt sont la philosophie féministe, et notamment le Black feminism, les études afro-américaines, la théorie critique, le marxisme ou encore le système carcéral. En 1998, elle fait son coming-outauprès du magazine Out2.
Elle fut à deux reprises, en 1980 et 1984, candidate à la vice-présidence des États-Unis pour le parti communiste américain en tandem avec Gus Hall.
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DERNIER LIVRE DE PIERRE PERRET :
Les grandes pointures de l’histoire Éditeur : le cherche midi
On les croyait beaux, vaillants et sans défaut. La réalité était tout autre… Du Guesclin était tordu comme un bretzel. Jeanne d’Arc n’avait rien d’une blanche colombe. Napoléon – le plus grand cocu de tous les temps – avait des lèvres de lézard et une brioche de dindonneau. Quant à Saint Louis, Charlemagne, Vercingétorix, Cléopâtre et quelques autres… autant pour eux !
L’ami Pierrot, inénarrable narrateur, remet enfin les pendules à l’heure et nous révèle tous les savoureux détails que l’on nous avait ignominieusement cachés et qui pourtant ont fait l’histoire. Les puristes vont adorer, et tous les autres aussi !